A project to explore how the commons transform public action in Europe
Re-municipalisation et “community organizing” en terre britanique – 24-27 février 2020

La Grande-Bretagne est souvent considérée comme l’une des terres d’origine des communs : le concept s’y structure notamment pendant la période médiévale autour des zones forestières et pâturages, encadré par la Carta Foresta, puis dans le cadre de luttes liées au mouvement des enclosures au XVIe siècle (qui supprime la possibilité de faire un usage collectif de ces grands espaces ruraux). Il trouve aujourd’hui une actualité particulièrement forte : la Grande-Bretagne demeure largement marquée par les privatisations de l’ère Thatcher puis de ses successeurs ainsi que par différentes formes de spéculation, avec une érosion forte des services comme des espaces publics.  On voit pourtant poindre cette dernière décennie de nouvelles dynamiques, portées par des gouvernements locaux ‘progressistes’ (sic), qui construisent des stratégies pour favoriser l’émergence de communs sur leur territoires, questionnent les modèles économiques ‘extractifs’, ré-inventent des services publics ‘en commun’… Du « community wealth building » au « public ownership », en passant par les partenariats publics-communs, en allant peut être vers un nouvel âge des pouvoirs locaux ?
Par ailleurs, la Grande-Bretagne est également un terreau emblématique de formes d’activisme, d’auto-organisation et de mobilisations citoyennes, de community organising,  particulièrement inspirants. Comment ces dynamiques nourrissent-elles des formes de réappropriation de l’espace et de l’action publique?
Ce sont toutes ces thématiques que nous avons voulu explorer pour notre sixième voyage dans le cadre du programme « Enacting the Commons ».

Pour en savoir plus sur nos rencontres lors du voyage, voici notre Journal de bord Angleterre.

Emergence d’un mouvement de re-municipalisation des services publics

Inspiré de villes comme Barcelone, un mouvement municipaliste se structure à travers le pays afin de reconstruire des services publics sur la base d’un « public ownership ». Ancré au sein de Labour, il semble néanmoins transcender peu à peu les clivages politiques. Quelles sont pour cela les stratégies de villes, des élus et des administrations?  ? Comment s’organisent les communautés localement ? Quelles formes de partenariats publics-communs peuvent en découler ? Nous traiterons ces questions en croisant l’expérience d’administrations de différents quartiers Londoniens engagés dans de telles démarches, de chercheurs – David Hall, Hilary Wainwright et Bertie Russell, contributeurs au Transnational Institute, Matthew Laurence de Common Wealth, ou encore de Cat Hobbs qui porte la campagne “We own it”. L’objectif sera de comprendre ce qui se joue en Grande-Bretagne en matière de public ownership, d’aborder et d’échanger autour d’exemples locaux de re-municipalisation et d’identifier les stratégies pour faire levier au niveau local, translocal ou national.

L’approche du community wealth building

Comment penser une économie territoriale ‘en commun’, c’est-à-dire réorganiser l’économie localement afin que la richesse n’en soit pas extraite mais demeure et circule au sein de la communauté ? Parmi les stratégies pour mettre en œuvre cette approche, des villes comme Manchester, Oldham, Preston, ou encore le quartier de Islington à Londres, expérimentent le développement  de modes de propriété hybrides, les banques communautaires, de nouvelles formes de marchés publics, etc. De manière générale, on note un rejet croissant de la marchandisation des services essentiels. L’alternative n’est pas forcément la nationalisation ou municipalisation, et les partenariats publics-communs se présentent comme une troisième voie, porteuse de transformations sociales radicales.
La ville de Preston est emblématique de ce mouvement. Anciennement industrielle et ayant souffert de fortes coupes budgétaires, cette ville proche de Manchester a su se réinventer sur un modèle vertueux reposant sur la coopération. Partant d’un ras-le-bol des habitants de se voir imposer des décisions prises à des centaines de kilomètres de là, l’accent a été porté sur la mise en pouvoir des habitants et sur le maintien des dépenses au service de l’économie locale. La ville a ainsi lancé un programme pour incuber des coopératives auto-gérées par les travailleurs et expérimente la mise en place d’une banque communautaire. Ces réflexions ont été menées avec l’aide du CLES (Centre for Local Economic Strategies), qui expérimente localement sur des nouveaux modèles économiques et services publics, ou encore en lien avec le collectif/think tank Common Wealth.

Community organizing

Une autre piste d’entrée vers les communs que nous avons identifiée en Grande-Bretagne comme structurante est celle du « community organizing ». Comment les communautés s’organisent localement pour repenser la ville ? Quels rapports de force/relations existent-ils entre activisme et acteur public ? On a vu ces dernières décennies se développer la notion de « Neighbourhood planning », la planification de voisinage qui permet aux communautés de disposer d’un ensemble d’outils pour s’assurer d’avoir une voix dans les projets locaux de développement. Cette notion a été introduite par le Localism Act de 2011 pour la décentralisation et la montée en compétence des autorités locales sur leur territoire. Même s’il a été critiqué, il témoigne d’une volonté d’évolution vers plus de gouvernance locale. Il instaure entre autres un certain nombre de droits communautaires permettant aux citoyens d’organiser la vie locale comme le community right to build/to reclaim land/to challenge.Autour de ces questions, nous échangerons avec les agents du quartier de Camden et les acteurs de MAKE, un espace de jardin dédié à la collaboration et à l’innovation sociale afin de croiser nos expériences sur l’ancrage des partenariats au sein de la communauté.
Des collectifs appuient ces dynamiques et les poussent encore plus loin. Public works, par exemple, s’intéresse plus spécifiquement à l’espace public et Participatory City accompagne les projets locaux de territoire à travers le programme Every One Every Day, mené à Barking & Dagenham, en périphérie de Londres.

 

Quelques liens inspirants :

 

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